Des digues de près de 400 ans en Imerina
Les premières digues qui entourent la Ville des Mille datent du
XVIIe siècle et du XVIIIe siècle, sous le règne d'Andriantsitakatrandriana
(1630-1650 environ) ,sixième roi de l'Imerina depuis Rafohy, sous
celui d'Andriamasinavalona (1675-1710) et sous celui d'Andrianampoinimerina
(né en 1745 et tournant le dos en 1810).
Selon la tradition, Andriantsitakatrandriana consacre son règne à encourager l'agriculture.
Il lance alors un défi à ses deux fils, l'aîné seigneur de Tsimilefa à
l'ouest de Soanierana et le cadet, celui d'Alasora comme quoi celui qui
maîtrisera l'eau, lui succèdera. Lorsque vient la nuit, tout Alasora
travaille d'arrache-pied à l'aide de bois et de terre et quand tout est
terminé, le maître du fief prévient son père. C'est ainsi
qu'Andriantsimitoviaminandriandehibe règne sur l'Imerina vers
1650-1675.
Plus tard, son fils Andriamasinavalona décide de poursuivre cette œuvre pour nourrir son peuple, son premier souci
étant d'intensifier l'agriculture. Aussi agrandit-il les digues limites
du Betsimitatatra jusqu'à Ilanivato, notamment autour d'Alasora par la
construction de la digue appelée Vahilava.
La tradition raconte que pour
encourager son peuple à construire cette digue, Andriamasinavalona et
son sage conseiller Andriamampandry jouent la comédie: le premier
annonce au cours d'un Kabary (réunion) public à Andohalo que le peuple
doit être rassasié, à quoi répond son conseiller: Nous ne le pouvons
pas. Le roi doit alors le battre pour ces paroles de refus et le
peuple s'interpose en promettant de tout faire pour augmenter la production rizicole.
C'est ainsi que débute la construction de Vahilava à Ambohitrandriananahary, passant par Antanjonandriana jusqu'à
Andriantany et ce, pour gagner de nouvelles rizières sur le Betsimitatatra.
Près d'un siècle plus tard, deux objectifs poussent Andrianampoinimerina quand, à son tour, il édicte la création de digues
dans l'Imerina réuni. D'une part, aménager de nouvelles rizières et les
protéger des fortes crues saisonnières, d'autre part, constituer des
frontières entre les six territoires pour que leurs populations
n'empiètent sur ceux de leurs voisins.
Le devoir de l'État ne consiste qu'en des travaux qui rendent la terre productrice puisque
c'est là la façon d'assurer le bien-être de la population, le riz et moi
ne faisons qu'un, aime-t-il à répéter. Pour Andrianampoinimerina, la
paix étant instaurée dans son royaume, il est temps de penser au
bonheur de son peuple en menant une guerre contre la faim.
C'est au cours d'un grand Kabary comme à son habitude qu'il en donne l'ordre
d'exécution après explications et délibérations. Les digues seront
construites parce que l'eau non maitrisée est mon ennemie et pour que
mon peuple soit repu.
Maitrise de l'eau par l'établissement d'un grand
réseau d'irrigations dont tous doivent bénéficier, qu'ils aient une
grande ou une petite rizière. Quiconque compte détourner l'eau à son
profit, sera sévèrement puni.
Les digues créées sous Andrianampoinimerina sont appelées Lavatehezana. Chaque territoire et
à l'intérieur du territoire, chaque fokonolona ont leurs digues à
construire et à préserver. À chaque fois qu'une digue est élevée, assez
résistante pour affronter les intempéries, le roi offre des zébus à
raison d'un pour dix hommes. C'est aussi l'occasion pour tous les Merina, en présence du roi, de renforcer le Vahilava bâti par son
illustre ancêtre.
En tant que limites territoriales, ces digues sont grosso modo le Vahilava qui sépare l'Avaradrano du Vakinisisaony à l'est
(de Tanjombato à Vakiniadiana-Mantasoa), l'Antenina entre le
Vakinisisaony et l'Ambodirano à l'ouest, le Vakinitoalaza entre
l'Avaradrano et le Marovatana, le Kelilalina entre le Vonizongo et le
Marovatana, l'Ampitatafika et l'Antongona entre l'Ambodirano et le Marovatana.
Il y a aussi celles entre l'Ambodirano et le Vakinankaratra
au Sud, celles sur la rivière Ambatotsipihina. À noter que dans le
Vakinankaratra, une digue frontière est aussi construite entre Antsirabe
et Betafo.
À cela s'ajoutent les diguettes telles celles à l'intérieur de l'Avaradrano comme Jabo et Sahasarotra chez les
Tsimahafotsy, Mamba et Andrano nahoatra chez les Tsimiamboholahy,
Maromanitra et Mananara dans le Mandiavato, et chez les Voromahery,
Andranolava au centre du Betsimitatatra d'Isotry et Andava mamba à
Andrano mena et Soavimasoandro.
de Pela Ravalitera Journal Express |