La tradition particulière d’Ambohibato
Les rois qui se succédèrent, n'osèrent pas
ni enfreindre ni détourner de leur destination les actes
de cession d'Ambohibato à Andrianandrintany lesquels actes
reposent sur les "vely rano" et "sotro vokaka"
(ingestion d'un liquide qui entraînerait la mort en cas de
trahison), "lefon'omby kely malahelo" (abattage symbolique
d'un veau orphelin à coups de lances) à Andranoritra.
Andriamasinavalona, après avoir vaincu Lambotsitakatra,
se conforma à la tradition de son grand-père Ralambo
et alla à Ambohibato dresser ses "pierres levées"
auxquelles il donna le nom d'Ankazonorona. Après le kabary
prononcé à Andohalo d'Ambohibato, la foule monta
vers Ankamory où eurent lieu les réjouissances et
les danses et c'était là que furent dressées
les pierres. Parmi les hôtes de l'événement,
figura la prétentieuse comtesse Rampanambonintany
(propriétaire de ce qui est sur la Terre) sœur
ainée d'Andriamasinavalona dont il satisfaisait les
désirs, et la fille d'Andriamasinavalona Rangorinimerina
elle même mère d'Andriambelomasina. Cette comtesse
envia Ambohibato et fit des démarches pressantes auprès
d'Andriamasinavalona en vue de le posséder mais elle en
fut déboutée. Après avoir manqué Ambohibato,
elle se tourna vers Ambohitrony qui, à son tour, lui fut
refusé : "c'est toujours la propriété
d'Andrianandrintany, d'Andrianjohy et d'Andriantsiahozona que
je peux jamais ébranler au profit de qui que ce soit, le
"velirano" est inviolable". Rampanambonintany insiste
: "ce petit coteau-là au sud d'Ambohibato, où
il n'existe pas de nobles ensevelis, fais que je puisse m'y établir
frère", dit-elle avec empressement, tellement elle
est séduite par les eaux bleues et les nénuphars
du marais environnant, "pour le transformer en Ambohitrontsy
du sud car Ambohitrontsy (qui lui appartient de droit) est occupé
et exploité par Ingorinimerina". D'où le nom
d'Ambohitrontsy donné au petit coteau au sud d'Ambohibato.
Ambohitrontsy se modifia plus tard en Ambohitrosy. "C'est
encore au milieu du domaine d'Andrianandrintany que je tombe sous
le coup des paroles données de Ralambo", répliqua
Andriamasinavalona. Insinuant, la comtesse ajouta: "les Andrianandrintany
me sont apparentés et je désire vivre au milieu
d'eux". Convaincu de cette parole sympathique, Andriamasinavalona
et les Zanakandrianandrintany s'entendirent pour lui laisser la
petite île à l'extrême sud du domaine d'Andrianandrintany
à laquelle on donna le nom de d'Anosindrampanambonintany
(île de Rampanana), simplifié en Anosindrampanana
(Rampanana est considéré de nos jours considérée
par les profanes comme un homme). La moitié nord de cet
îlot reste encore partie intégrante, avec ses marais,
du domaine d'Andrianandrintany.
F. Razanajatovo
Les ancêtres n’ont pas laissé d’écrits,
cependant ce que leurs mains ont touché, leurs pieds foulés,
et leurs yeux vus, ils ont laissé les traces de leur vie,
de leur génie et de leurs tribulations.
Ces traces s’ajoutant avec ce qui était recueilli
et retenu par écrit dans le Tantaran’ny Andriana,
édité par la Colonie avec le concours de l’Académie
malgache, permettent d’envisager dans leur ensemble, l’histoire,
les vies et les mœurs des ancêtres malgaches.
Le peuple Hova, malgré son unité dans ce qu’on
appelle son histoire, présente, pour ainsi dire, des enclos
dans lesquels chaque clan s’enferme jalousement surtout
les différents clans de noblesse. Monsieur le docteur Rasamimanana
l’a dit un peu exagérément dans l’introduction
à sa brochure "Les Andriantompokoindrindra" :
"Car il suffit de se rappeler la haine qui existait alors
entre les diverses castes, haine qui n’a cessé de
s’accroître depuis le moment où les rênes
du gouvernement tombèrent entre les mains d’une femme;
c’est-à-dire à partir de l’époque
où le premier ministre Rainilaiarivony, d’origine
roturière, exerça d’une manière effective
le pouvoir suprême".
De cela nous déduisons que : pour savoir à peu près
exactement ce qui concerne un clan ou une caste, il faut qu’on
en soit un natif. Voilà pourquoi les auteurs du "
Les Andriantompokoindrindra " ignorent ce qui s’était
passé à Ambohibato même les réalités
imputables aux ancêtres dont les Andriantompokoindrindra
se réclament, Analamahazo de Ralambo et Ankazonorona d’Andriamasinavalona.
Ces deux monuments historiques sont, pour ainsi dire, intacts
à Ambohibato.
Le présent écrit se complète avec celui de
J.R. Maintikely "Zanak’Andrianandrintany ao Ambohibato",
paru en 1927.
Jean-Pierre Domenichini
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Ralambo et Ambohibato, voilà deux noms inséparables
dans l' histoire du royaume hova. Avec Ralambo, germa l' idée
d' unifier le dit royaume : ainsi, il s' intéressait ou se
désintéressait de ses parents directs ou collatéraux selon le plan
qu' il s'était tracé en vue d' atteindre le but qu' il s'
était proposé et qu' il ne pouvait seul réaliser.
Tous les traits et faits qui concernent Ralambo et Ambohibato ont
été puisés dans des traditions, car l' écriture en ce temps-là
n' était pas encore utilisé. Dans ce qui suivra, sont éliminés
les faits qui s' écartent de loin de ce qui est dit, ou en
allusion dans les "Tantaran'ny Andriana".
Du temps de Rangita, Ambohibato était un lieu sacré qu 'elle
en défendit l' habitation. C' était là qu' on avait invoqué
: "Andriamanitra Andriananahary, Andriamanidahy, Andriamanibavy,
ranakandriandahy, ranakandriambavy, zanahary vazimba ray vazimba
reny, Ravolafotsy, Rambolasirana, Razaizay, venez assister et
accepter nos sacrifices. Venez emporter nos maux. Ce que nous
désirons, c'est de n'avoir rien à souffrir."
Ambohibato fut un temps consacré comme lieu de circoncision
dont la cérémonie donnait lieu à une grande réjouissance et où
tous les garçons nobles d' alors furent circoncis au milieu d'
une manifestation de joie monstre. S'y trouvent encore des
pierres sanctifiées et dressées par Rangita sur lesquelles était
placé l'enfant à opérer et les choses à utiliser au cours de l'opération
et pendant la fête : eau, bananes, canne à sucre, jonc, bambou.
Une place y était réservée à l'implantation du pied de bananier.
Andranomiry, en ce temps-là, n'était pas encore endigué et ses
eaux se répandirent, occupant toute la plaine au nord d'Ambohimarina
et de Mahatsinjo. C'était là que fut recueillie "l'eau puissante"
destinée à la circoncision.
Peut-être, avant Ralambo, c'est à Ambohitrony, colline moins
élevée qu'Ambohibato, où se trouvent le tombeau d'Andrianandrintany
et de ceux de ses descendants, qu'eussent habité certains
"Andriana" dont Andriamoraony.
On eût pu dire qu'Ambohibato était du temps de Ralambo, la capitale
du royaume, car c'était là que Ralambo désigna son successeur
.
Lorsque d'Ambohimanorohitra, Andrianandrintany arriva à
Ambohibato et que Ralambo, qui l'aimait car il lui était apparenté,
à la fois du côté paternel et du côté maternel, lui concéda Ambohibato,
il prêta serment de fidélité, de soumission et d'appui à Ralambo
afin que celui-ci devint le maître suprême du pays et du royaume.
L'administration française ayant reconnu le droit de propriété
des Zanakandrianandrintany, débouta l'usurpateur et lui intima
l'ordre de restituer les joncs qu'il avait fait dérober. Ensuite,
elle conseilla aux Zanakandrianandrintany d'immatriculer leurs
propriétés afin, dit-elle, d'éviter le retour de pareille prétention
qui vous causerait des embarras dont vous ne pourriez pas vous
tirer avantageusement.
La levée d'argent pour couvrir les frais du procès et ceux du
bornage étaient une affaire de quelques jours grâce à la solidarité
des Zanakandrianandry laquelle ne cessait de les unir depuis l'affaire
Ratsiantahana.
Le bornage du domaine des Zanakandrianandry a été fait en 1901
et 1902. Depuis, des Vazaha se sont succédé et ont planté des
piquets à Ambohibato, mais après s'être renseignés aux domaines
ne remirent plus les pieds à Ambohibato.
Les actes d'immatriculation ont ainsi homologué les actes de cession
par Ralambo et le bornage était en quelque sorte l'érection de
la cinquième pierre par l'administration française pour garantir
aux Zanakandrianandrintany la pleine jouissance de la terre qu'ils
ont héritée de leurs ancêtres depuis environ trois siècles.Voilà
donc consommé la parole de Ralambo : "Ambohibato est à Andrianandrintany
et ses descendants éternellement".
Vivant paisiblement sur la terre de leurs ancêtres, les Zanakandrianandrintany
ne forment plus qu'un vœu : c'est de voir changer le nom de la
gare d'Ambohimanambola, car le nom d'Ambohimanambola ne répond
pas à la réalité actuelle et contredit la vérité historique car
Ambohimanambola est presque synonyme de Kelimalaza, idole de l'Imerina.
En effet, la gare d'Ambohimanambola est éloignée du véritable
village d'Ambohimanambola d'environ 3 kilomètres ce qui fait qu'Ambohimanambola
véritable est rattaché au canton d'Ambohimalaza tandis qu'Ambohimanambola
gare est rattachée au canton d'Ambohimangakely.
Ambohimanambola gare se trouve sans conteste à Ambohibato. L'emplacement
occupé par la gare a été amputé du domaine des Zanakandrianandrintany.
Qu'elle n'eût pas été la joie des Zanakandrianandrintany, et aussi
avec eux ceux qui connaissent l'histoire de l'Imerina, si cette
gare portait l'un des noms suivants: Ralambo, Andriamasinavalona,
Andrianandrintany, Analamahazo, Ankazonorona ou Ambohibato, rétablissant
la vérité historique
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